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Doctorante
Penser l’épidémie par la fiction. La littérature épidémique entre défis écologiques et enjeux sanitaires
Thèse inscrite le 09/08/2021, soutenance le 28/05/2024
Contrat doctoral Région Grand Est
Jury :
M. Guillaume Bridet, professeur à la Sorbonne-Nouvelle (Paris), rapporteur,
Mme Ninon Chavoz, maître de conférences HDR à l’université de Strasbourg,
Mme Mélanie Joseph-Vilain, professeur à l’université de Bourgogne, rapporteur,
Mme Irène Langlet, professeur à l’université Gustave-Eiffel,
M. Anthony Mangeon, professeur à l’université de Strasbourg, directeur de la thèse.
Penser l’épidémie par la fiction, telle est l’ambition de ce travail qui repose sur un double constat. D’un côté, la prolifération des œuvres romanesques consacrées à l’épidémie ; de l’autre côté, la tentative de se préparer et/ou de réparer un mal épidémique à travers la fiction.
Malgré la longue histoire des épidémies passées et le progrès technoscientifique, l’avènement d’une nouvelle maladie contagieuse provoque chez l’être humain la même sidération et le même désarroi. L’épidémie fait irruption dans la réalité quotidienne, provoquant le bouleversement de l’ensemble du corps social et de ses structures : de la vie individuelle à la vie communautaire, de l’organisation politique à l’organisation économique. Fait social total, pour reprendre les mots de Marcel Mauss, l’épidémie a donc un grand pouvoir révélateur. S’insérant à l’intérieur d’autres études dédiées aux fictions épidémiques (contagious studies) cette recherche vise à approfondir la compréhension de l’imaginaire épidémique à travers deux chemins principaux. L’un spatio-temporel, proposant un corpus d’œuvres composées au XXIe siècle et privilégiant une production littéraire africaine, souvent négligée dans les études comparatives sur les épidémies. L’autre est disciplinaire, puisque pour essayer de comprendre le fait épidémique dans sa complexité, notre thèse est fondamentalement transdisciplinaire.
Le discours s’organise alors en trois parties. Dans la première, l’épidémie est analysée à partir des études en sciences dures et sociales. Cet état de l’art nous permet de montrer que l’histoire des maladies émergentes (notamment celles d’origine zoonotique) se tisse inextricablement à l’histoire des transformations socio-économiques conduisant au changement climatique et à la perte de biodiversité. D’un autre côté, nous analyserons les réactions de la société contemporaine : interprétations et gestions des épidémies seront ici confrontés. Dans la deuxième partie nous nous dédions à l’analyse des œuvres romanesques (close reading). À travers la lecture d’œuvres réalistes (Véronique Tadjo, Paule Constant) et d’autres sciences-fictionnelles (Paul McAuley, Lauren Beukes, Deon Meyer, Namwali Serpell), nous étudions la représentation des épidémies et leurs enjeux. Nous constatons alors que les romans mettant en scène des épidémies d’origine zoonotique, qu’elles soient réelles ou imaginaires, œuvrent à une réflexion plus vaste sur la relation entre êtres humains et non humains, participant ainsi à donner forme aux peurs vis-à-vis des multiples crises auxquelles on fait face mais aussi à ouvrir à d’autres futurs possibles (cela notamment dans le corpus science-fictionnel). C’est en raison de ce pouvoir imaginaire que, dans la dernière partie de la thèse, nous proposons l’étude de deux usages de la fiction différents mais quelque part complémentaires : le scenario planning et la bibliothérapie. À travers la technique du scenario planning, nous examinons le rôle de la fiction comme outil de pensée propre à être sollicité par les puissances publiques afin de se préparer aux événements catastrophiques – notamment les épidémies. En ce sens, la fiction participe à l’élaboration de politiques publiques de santé. Ensuite, à travers la bibliothérapie, nous étudions les multiples déclinaisons de la fiction comme remède proposé à des fins thérapeutiques particuliers. Cette démarche questionne l’appropriation et l’instrumentalisation de la littérature, soulevant des enjeux éthiques non négligeables. Finalement, plus encore qu’outil au service (d’une politique, d’une thérapie), la littérature dévoile sa puissance parce qu’espace privilégié où les lecteurs peuvent faire des expériences sensibles. Ainsi, les fictions d’épidémie peuvent aspirer à nous faire penser, nous questionner, nous perturber, nous déplacer.
La thèse peut se lire comme un jeu des miroirs. Un premier miroir se pose entre la première et la deuxième partie, montrant les échos et les influences entre littérature scientifique et littérature fictionnelle. Un deuxième miroir se pose ensuite entre la deuxième et la troisième partie, montrant une pensée qui procède en s’appuyant sur la littérature. Penser l’épidémie par la fiction signifie alors non seulement repérer le réel dans l’imaginaire, mais aussi – et surtout – réussir à (re)imaginer le réel grâce aux ouvertures des fictions.
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