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En marge du « canon » ? « Contre-littératures » et études littéraires (8 novembre, 14h-17h, Patio salle 44.02)
Dans un essai publié en 1975 (Les Contre-littératures), Bernard Mouralis se proposait d’analyser la manière dont le canon (littéraire) se définissait en disqualifiant une large partie de la production textuelle d’une époque. Inspirée de cette démarche, cette séance se focalisera sur la relation que la « littérature » entretient avec ce qui est spontanément maintenu à sa marge, afin de mettre en avant l’intérêt que peuvent avoir ces « contre-littératures » pour les études littéraires.
Deux chercheurs viendront dans ce cadre présenter leur approche et leurs travaux : Matthieu Letourneux (Paris-Nanterre), spécialiste de la culture médiatique et de la littérature sérielle (19e-21e siècles) et Lucien Derainne (Université Jean Monnet), spécialiste des rapports entre science et littérature aux 18e et 19e siècles.
Collectif et démocratie : la pensée du roman contemporain (20 décembre 2024, 14h-17h)
Autrices de deux livres parus en 2024 dans la collection « Savoir Lettres » de Hermann, deux chercheuses viennent croiser leurs travaux sur la littérature contemporaine.
Anne Cousseau, professeure à l’université de Lorraine, et autrice de Fictions du collectif dans le récit français contemporain, s’intéresse aux nombreux auteurs français (Maylis de Kerangal, Laurent Mauvignier, Yannick Haenel, Annie Ernaux, François Taillandier, Virginie Despentes, Aurélien Bellanger, Éric Reinhardt, Pierre Ducrozet ou Charles Robinson) qui font preuve de sensibilité à l’égard d’une véritable mutation civilisationnelle, celle qui se manifeste dans les rassemblements populaires, la mondialisation, les réseaux numériques, les communautés ou les pratiques collaboratives, participatives ou solidaires.
De son côté Sylvie Servoise, professeur à Le Mans-Université, arpente, dans Démocratie et roman : explorations littéraires de la crise de la représentation au XXIe siècle, un territoire comparatiste, de François Bon et Leslie Kaplan pour la France, à Giorgio Vasta et Walter Siti pour l’Italie, en passant par Zadie Smith, Jonathan Dee, Don DeLillo pour le monde anglo-saxon. Elle s’intéresse à la manière dont leurs romans représentent le peuple démocratique en « répar[ant] un défaut de visibilité » et dont ils témoignent d’une défiance à l’égard des représentations nationales.
Que pense le roman des formes du collectif en émergence et quelles expériences propose-t-il à ses lecteurs et à ses lectrices pour surmonter la crise démocratique que nous vivons ? telles sont les questions que la séance du vendredi 20 décembre de 14h à 17h entend développer à partir de la présentation, par A. Cousseau et S. Servoise, de leurs travaux respectifs.
Cette séance est ouverte à tous (membres du CERIEL, étudiants de l'Atelier recherche, etc.)
Salle 4402 - bâtiment Le Patio - Campus de l'Esplanade - Université de Strasbourg
Anne Cousseau | Sylvie Servoise |
Mercredi 13 mars 2024 (18h-20h, salle 409): Conférence de Lucien Derainne (Université de Saint-Étienne): "Éthique méritocratique et romantisme"
Depuis quelques décennies, l’émergence d’un nouveau discours managérial sur le travail vantant le talent, la vocation ou le développement personnel, s’est accompagné d’une relecture des corpus romantiques. Des sociologues comme Nathalie Heinich, Pierre-Michel Menger ou des économistes comme Adrian Woolridge affirment que la littérature romantique aurait posé les bases culturelles de ce nouveau mode d’organisation sociale fondée sur « l’élite artiste » ou le « travail-artiste ». Nuançant cette thèse, cette communication défendra plutôt l’idée que la littérature romantique du premier XIXe siècle a pensé les frictions possibles entre la démocratie et la méritocratie, notamment dans une perspective éthique. La généalogie que l’on peut établir entre le XIXe siècle et l’époque actuelle ne serait-elle pas, dès lors, plus critique qu’on ne veut le croire ?
Jeudi 28 mars 2024 (18h-20h, salle 409): Conférence de Grégoire Tavernier (Université d'Orléans): "Pour qui s'élever en démocratie ? les mirages du ruissellement de l'ambition dans le roman du XIXe siècle"
Provenant de voix bonapartistes, libérales ou socialistes, ou issus de fictions utopiques, des discours favorables à l'ambition émergent durant la première moitié du XIXe siècle, et justifient cette passion à l'aune de sa transitivité, en supposant la promotion conjointe du sujet dynamique et de la Cité démocratique. Le roman de mœurs, dont on suivra plusieurs auteurs importants (Stendhal, Balzac, Sand, Flaubert, les Goncourt, Zola) déconstruit ce discours lénifiant, en substituant aux redistributions bénéficiaires escomptées des circulations mauvaises, produites par des personnages qui multiplient autour d'eux les victimes de leur ambition. Une double circulation néfaste est ainsi traduite : la circulation épidémique d'une passion que s'approprient mimétiquement de nombreux jeunes gens, la circulation autour d'eux, également par voie de contagion, d'un malheur en cascades.
Jeudi 14 décembre (18h-20h, salle 409): Charles Forsdick (Cambridge), professeur invité du master CLE (Cultures Littéraires Européennes) donnera une conférence intitulée: "Argumenter autour de Toussaint Louverture"
Spécialiste de la littérature postcoloniale francophone et de l'histoire coloniale française, Charles Forsdick est notamment l'auteur,avec Christian Høgsbjerg, de Toussaint Louverture: A Black Jacobin in the Age of Revolutions (London: Pluto, 2017)
Journée d’étude jeunes chercheurs & chercheuses « Littératures du Sud » (APELA)
Cette année, pour la journée d’étude des jeunes chercheurs et chercheuses « Littérature du Sud » de l'Association Pour l'Étude des Littératures Africaines (APELA), nous vous proposons d’interroger la relation entre la notion de résistance et les différentes formes de réécritures qu’opèrent les auteurs africains et caribéens dans leurs œuvres. Que ce soit en se réappropriant des textes appartenant à la tradition littéraire occidentale, en subvertissant des modèles littéraires ou la langue française pour créer une écriture hybride, ou encore en proposant de nouvelles représentations de personnages et d’imaginaires devenus conventionnels, ces auteurs proposent une « esthétique de la résistance ».
Vous trouverez le programme détaillé en cliquant sur l'image ci-dessous.
La journée aura lieu le 09 février 2024, à la Maison de la recherche de l’Université de Paris III - Sorbonne Nouvelle.
Si vous souhaitez participer en présence, et afin de respecter la capacité d'accueil de la salle, nous vous invitons à nous contacter pour vous inscrire aux adresses suivantes : lea.dumetier@etu.unistra.fr, ismael.kone@univ-lorraine.fr, marie.pernice@sorbonne-nouvelle.fr. Un lien Zoom vous sera également communiqué quelques jours à l’avance et à votre demande pour une participation en distanciel.
Journée d'études organisée par le CERIEL (B. Marquer), en collaboration avec le GEO (Victoire Feuillebois, UR 1340), le 30 novembre 2023 (Salle de conférence de la MISHA). Cette journée bénéficie du soutien de Lethica.
Enseigner la littérature du XIXe siècle, mission impossible ?
Ce siècle qu’on associait, il y a peu encore, à la modernité des révolutions (politique, sociale, esthétique), et donc à un socle de valeurs dont notre société serait l’héritière, s’éloignerait de nous non véritablement en raison du temps qui passe, mais parce qu’il incorporerait des contenus, des pratiques et des discours subitement devenus inconcevables pour les mentalités contemporaines – et à ce titre il serait devenu fatalement réfractaire à toute pédagogie.
Parmi les réflexions qui ont suivi l’émergence du mouvement #metoo ou le développement de la pensée postcoloniale, puis décoloniale, on remarque en effet que le XIXe siècle a souvent été incriminé : s’il l’est depuis longtemps dans le monde anglo-saxon (où on l’accuse d’avoir remisé les « folles dans le grenier » et d’avoir été le laboratoire du regard orientaliste), plusieurs débats et dissensus pédagogiques récents montrent qu’il est de plus en plus exposé à la critique dans le contexte académique français. La remarque d’une collègue reconnue, directrice d’études à l’EHESS, témoigne de ce changement de perception, qui traduit plus généralement un malaise quant aux missions dévolues à l’enseignement de la littérature. La « difficulté » d’enseigner la littérature du XIXe siècle mentionnée par Tiphaine Samoyault lors d’une émission de radio consacrée à la question de l’adaptation des classiques à l’époque de leurs lecteurs (voirLes Matins de France Culture, émission du 10 mars 2023), n’est en effet pas d’ordre linguistique ou culturel, comme cela peut être le cas pour des siècles plus anciens. Elle est, pour l’universitaire, d’ordre axiologique : l’antisémitisme, le racisme ou la misogynie d’auteurs reconnus, s’ils ont toujours été condamnables et largement condamnés par la critique dix-neuviémiste passée et présente, deviendraient d’insurmontables pierres d’achoppement pour transmettre la littérature de ce siècle. On serait alors face à un double paradoxe : d’une part, ce siècle où se met en place un canon scolaire deviendrait la zone la plus difficile à expliquer, peuplée de dead white males ayant construit une histoire de la littérature à leur propre bénéfice, histoire qui ne serait que le réceptacle de leur vision étroitement conservatrice de la société, comme du fait littéraire. D’autre part, à défaut d’être un objet de consommation courante au sein d’un marché éditorial qui, lui, est autorisé à cultiver la transgression dans une optique mercantile, le xixe siècle se verrait réduit à ce seul statut d’objet scolaire – quitte à ce qu’on le prive d’une partie des valeurs plurielles de la littérature et qu’on le confine à des lectures ad usum Delphini.
Cette journée d’études a pour objectif de regarder en face les « difficultés » que posent le XIXe siècle et de faire un bilan des approches critiques et herméneutiques qui permettent d’y répondre en contexte pédagogique. Elle cherche moins à relancer une polémique qu’à considérer ces débats comme une opportunité de réfléchir aux héritages et aux partages possibles autour de cette littérature parfois perçue comme intempestive et qui reste néanmoins cardinale dans les pratiques de lecture et d’enseignement.
Si le XIXe se retrouve au centre des débats, c’est aussi qu’il nous est plus proche : le discours romanesque problématique de Balzac ou des frères Goncourt serait d’autant plus insupportable aujourd’hui qu’il prend place dans des œuvres qui nous demeurent, paradoxalement, familières, du fait de l’univers représenté, des ressorts éthiques mobilisés, et, sans doute, des modalités esthétiques employées (un siècle dominé par le « réalisme » ?). Sa modernité finit en définitive par faire problème : si les spécialistes des siècles anciens peuvent (peut-être trop facilement) dédouaner leurs œuvres des accusations de représenter le viol ou l’oppression des femmes au motif que le Code Civil ne donne pas encore de réalité indiscutable à l’offense et que plus généralement, si l’on suit la périodisation de Geneviève Fraisse, le féminisme ne commence qu’avec la Révolution (Les Femmes et leur histoire, 2018), le XIXe siècle n’aurait plus d’excuses. Comment expliquer qu’il puisse être moderne, mais pas pour tout le monde ? Aussi est-ce peut-être avant tout de cette proximité que, fondamentalement, découle cette « difficulté », qui trahit elle-même le sentiment diffus que ce siècle est encore le nôtre.
Poser la question de l’actualité du XIXe siècle revient en premier lieu à prendre le parti d’une continuité, quand une approche axiologique normative peut donner le sentiment d’une rupture. Non (cela va de soi) pour légitimer les valeurs et les discours incriminés, mais afin de ne pas renoncer, face à ce que traduit cette « difficulté ». Ne pas renoncer devant les discours idéologiquement dérangeants, pour affronter leur histoire et leur rhétorique, mettre au jour des mécanismes et des procédés dont l’histoire politique récente montre qu’ils restent le fondement de nombreux discours extrémistes. Ne pas renoncer, non plus, aux capacités d’analyse sur lesquelles doit reposer toute formation en régime démocratique, régime dont les fondements datent d’un siècle qu’on ne peut considérer, sans danger, comme simplement honteux. Ne pas renoncer, enfin, à la pertinence critique des textes du passé, qui ne peut être uniquement fonction de leur adéquation aux valeurs du moment, aussi fondamentales soient-elles. Refuser, en somme, que l’approche des textes littéraires ne se réduise, dans l’enseignement, à un exercice d’actualisation choisissant une familiarité rassurante au profit d’une familiarité beaucoup plus dérangeante, alors même qu’elle constitue un enjeu majeur de formation, à l’école, à l’université, et pour la société.
Poser la question de l’actualité du XIXe siècle, c’est donc aussi s’interroger sur ce qui fait le socle d’une éducation à la démocratie, et sur la place à accorder à l’interdit. Une controverse, sise outre-Atlantique, alerte en effet sur le poids des mots, mais aussi sur l’importance de ne pas les couper de leur contexte d’utilisation : « l’affaire Verushka Lieutenant-Duval », du nom de cette collègue licenciée de son université (Ottawa) suite aux plaintes d’étudiants s’étant sentis agressés par l’emploi (voir Libertés malmenées, 2022), lors d’un cours, de mots considérés comme offensants quel que soit leur contexte d’utilisation, laisse entrevoir l’émergence d’une nouvelle forme de censure, liée à cette « difficulté » d’enseigner le passé, l’histoire des mots, mais aussi des idées. Quelle place donner, dans l’enseignement, à ce qui est aujourd’hui certes répréhensible moralement, mais non interdit juridiquement, et qui, surtout, apparaît utile à la compréhension générale du monde tel qu’il fut, et tel qu’il continue d’être ? Que traduit en outre cette nouvelle forme d’intolérance (comme on parle d’intolérance à un aliment) face aux mots et aux choses du passé ? Comment défendre une analyse fondée sur la raison, dès lors que l’affect devient une nouvelle référence, voire l’instrument d’une nouvelle norme ? Quelle place accorder au ressenti, dans une pratique qui vise avant tout à cultiver l’esprit critique, en sortant de soi, de son époque et de sa place dans la société, pour embrasser une vision plus large, plus instruite et – pourquoi pas – plus érudite ?
Envisager l’actualité du XIXe siècle par le biais de la « difficulté » à enseigner sa littérature nous semble permettre d’esquisser des réponses à ces questions, qui croisent, fondamentalement, celle de la formation d’un citoyen en régime démocratique.
Pistes de réflexion, non exclusives :
Comment enseigner l’histoire sans faire référence à ses cadres de pensée ? Et comment aborder ces cadres de pensée ? Quelle utilité peut avoir, dans ce contexte, l’étude de textes littéraires, et la maîtrise des outils indispensables à leur analyse ?
Le récent débat sur l’actualité du XIXe siècle a émergé d’une conversation sur la nécessité ou l’illégitimité d’une adaptation des textes à leur contexte de lecture. Quels enjeux pour cette adaptation, et une adaptation de quelle nature ? Quel impact sur les « leçons » à tirer du passé, dès lors qu’on le manipule ?
Quelle place accorder à l’affect dans l’enseignement, et plus précisément dans le choix des contenus d’enseignement ? Quels risques fait courir ce nouveau critère d’évaluation à la pertinence des choix opérés pour l’enseignement ? Quelle place est désormais accordée au savoir en tant que tel, dans le processus de formation d’un individu ?
La « difficulté » soulignée par certain.es enseignant.es et confirmée par les étudiant.es croise implicitement celle de la constitution des « panthéons littéraires », variables en fonction des époques, car en partie tributaires de l’actualité que l’on reconnaît aux valeurs véhiculées par les auteurs et leurs œuvres. Si ce travail de sélection-évolution est inévitable, que révèlent le choix de l’effectuer et les critères qui le motivent ? L’enseignement de la littérature ne doit-il que conforter, ou également déranger, interroger ?
Repères bibliographiques
Laurent Dubreuil, La Dictature des identités, Paris, Gallimard, coll. « Le Débat », 2019.
Philippe Forest, Déconstruire, reconstruire. La querelle du woke, Paris, Gallimard, 2023.
Anne Gilbert, Maxime Prévost, Geneviève Tellier (dir.), Libertés malmenées. Chronique d’une année trouble à l’Université d’Ottawa, collectif sous la direction, Montréal, Leméac, 2022.
Anne-Claire Marpeau, « Peut-on débattre d’un classique dans le cadre scolaire ? », Fabula-LhT, n°25, janvier 2021 [en ligne].
Hélène Merlin-Kajman, La Littérature à l’heure de #metoo, Paris, Ithaque, 2020.
Laure Murat, Qui annule quoi ? Sur la cancel culture, Paris, Seuil, 2022.
Paolo Tortonese, « Réécriture, lecture, censure », « Questions de société », Fabula, 19 mars 2023 : https://www.fabula.org/actualites/113245/reecriture-lecture-censure-par-paolo-tortonese.html
L'école d'automne de l'Institut Thématique Interdisciplinaire Lethica se tiendra du mardi 26 au jeudi 28 septembre 2023 à Strasbourg.
L'événement est co-organisé par Corinne Grenouillet (CERIEL, Université de Strasbourg) et Kenza Jernite (Université Sorbonne Nouvelle)
Vous trouverez le programme et de plus amples informations via ce lien : https://lethica.unistra.fr/evenements/evenement/ecole-dautomne-2023-representer-les-vieillesses-cinema-litterature-theatre-histoire-de-lart
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